Sevan Holemans est le premier de la délégation “société civile” à s’être envolé pour Rio, où il a rejoint la délégation internationale des jeunes, début juin. Entre l’Arménie et le Brésil, notre “Zinneke globe-trotter” a livré son enthousiasme communicatif à la conférence de presse de la Coalition Belge Rio+20!


Le blog de Sevan à Rio: http://youthinrio.blogspot.be/

Carte blanche de Sevan Holemans parue dans Le Soir du 9 juin 2012.

Sevan, raconte-nous ton parcours…

Là, je rentre d’Arménie où j’ai été stagiaire pendant 3 mois dans une fondation qui m’a permis de travailler sur place avec la société civile. Fin 2011, je terminais des études d’économie et d’éthique, dans 3 pays différents : Belgique, Pays-Bas et USA. J’ai eu entre autres comme professeurs Christian Arnsperger, Marthe Nyssens, Philippe Van Parijs et Isabelle Cassiers, promotrice de mon
mémoire sur l’économie du bonheur !

Après avoir été actif à l’AGL (assemblée générale des étudiants de Louvain-la-Neuve) et à la FEF (fédération des étudiants francophones), je fais partie à présent du Conseil de la Jeunesse (francophone belge), que je représenterai à Rio, aux côtés du représentant du Jeugdraad dans la délégation internationale des organisations de jeunesse.

Qu’attends-tu de Rio+20 ?

Je ne suis pas naïf quant aux résultats, mais je me réjouis de voir comment ça va se passer, comment chaque groupe majeur va se positionner. De même pour les groupes de pays : le G77, le BRICS… Les discussions autour de cet événement, c’est une valeur en soi. J’essayerai bien sûr également d’aller au Sommet des Peuples.

En Arménie, j’ai parlé de Rio+20 à plein de monde, personne n’était au courant, c’était l’occasion ! Les activistes ne savaient même pas ce que le gouvernement Arménien va défendre à Rio… Or, beaucoup de choses se mettent en place pour que chacun amène son input, il faut en profiter. C’est ainsi qu’on crée une culture du développement durable qui n’est pas encore effective partout dans le
monde. Ainsi, concernant les indicateurs alternatifs de croissance : un consensus est en train de se former, au niveau international, battons le fer tant qu’il est chaud !

Pourquoi l’Arménie ?

C’était à la fois un « retour aux sources familiales », et une occasion de mettre ma formation en pratique. L’Arménie est un pays en développement qui vit sous le joug des institutions internationales, surtout la Banque Mondiale. Suite à l’indépendance dans les années 90, tout a été privatisé et l’industrie, la chaîne alimentaire et les terres sont aux mains d’une oligarchie qui n’enrichit qu’elle-même. C’est une démocratie « de papier », même s’il y a une certaine liberté
d’expression. La société civile est en train de se développer, les initiatives foisonnent, surtout autour des questions environnementales.

Il y a matière : l’exploitation minière par exemple, est un vrai désastre : aucune norme n’est respectée, les études d’impact sont complètement biaisées… J’ai ainsi été à une grosse manifestation contre l’ouverture d’une nouvelle mine de cuivre dans une des dernières forêts d’Arménie… Il y a là
aussi de moins en moins de forêts ! Une autre initiative visait un parc public dans lequel ont été installés des petits magasins privés ; il s’agissait d’y mettre le ho-là.

Et après Rio ?

Soit je poursuivrai mon parcours académique au Collège de l’Europe, soit je retournerai en Arménie, pour travailler sur des projets de développement local. Ainsi, dans la région frontalière avec l’Azerbaïdjan, ces deux pays étant encore en guerre, l’activité économique est nulle. A l’initiative du Consul honoraire de la Norvège en Arménie, une plate-forme pour le développement de cette région a été lancée. Sur base des opportunités, compétences et motivations des habitants, la piste de l’éco-tourisme se dégage. On trace des chemins de randonnée. Il ne s’agit évidemment pas d’y promouvoir le tourisme industriel.

Attention : les routards ouvrent souvent la voie aux businessmen…

En Arménie, on est encore loin de ça. Le pays continue de se vider de ses forces vives. Sur 11 millions d’Arméniens dans le monde, 8 millions sont dans la diaspora ! Il y a eu en fait différentes vagues d’émigration, depuis avant le génocide jusqu’après la chute de l’Empire Soviétique. Sur les 3 millions qui vivent en Arménie, bien des jeunes rêvent encore de partir… Surtout à cause du manque de perspectives car la pauvreté y est particulière : tout le monde a au moins une habitation. Actuellement, on voit s’amorçer un mouvement de retour au pays. Pourquoi pas pour un projet de Développement Durable ?

Interview réalisé par Antoinette Brouyaux