En Belgique, la coopérative n’est pas autant utilisée que dans d’autres pays pour créer des collectifs d’habitat. C’est pourtant une structure juridique qui permet diverses formes d’habitats solidaires, pratiquées depuis 30 ans par le mouvement namurois Lutte Solidarité Travail. Présentation du contexte et de leurs expériences.

Situation des coopératives d’habitat en Belgique

En Belgique, la coopérative n’est pas autant utilisée que dans d’autres pays pour créer des collectifs d’habitat. Dans d’autres pays, par exemple au Canada et aux Etats-Unis, le statut des coopératives d’habitants permet de surmonter divers écueils, notamment fiscaux. En France, ce sont les coopérateurs qui bénéficient d’avantages fiscaux. Cela permet l’émergence d’initiatives intéressantes, telle que la coopérative foncière Terre de Liens qui permet l’accès aux terres (et parfois aussi aux bâtiments de ferme) pour les candidats à l’agriculture paysanne et biologique. Une initiative similaire, Terre en vue, existe à présent en Belgique.

Au niveau du logement, une bonne partie des sociétés de logements qui gèrent le logement social ont pris le statut de coopérative alors qu’à la base ce sont quasi toutes des sociétés communales ou inter-communales. On confond donc fréquemment les sociétés de logements coopératives communales avec les coopératives de locataires. Les unes et les autres gèrent des logements sociaux, mais dans un cas l’assemblée générale et le Conseil d’Administration sont composés de locataires et dans l’autre de représentants des élus communaux. Quant aux expériences de coopératives nouvelles, elles sont souvent liées à des projets d’habitat groupé ou autre et sont souvent de taille très réduite.

La question du cadre juridique des coopératives foncières et immobilières devrait donc être remise en débat. D’autant plus que le logement coopératif pourrait représenter, sous certaines conditions de suivi et d’engagement mutuel, une voie de sortie par le haut à l’endettement de certains ménages grâce à la garantie du droit au logement décent que représente ce type d’habitat alternatif.

L’expérience de Lutte Solidarité Travail

Dans le sens de cette réflexion, le mouvement LST développe depuis de nombreuses années des projets et des recherches particulièrement novatrices en matière « d’habitats », enracinées dans les luttes des populations les plus pauvres.

Le mouvement LST et les personnes et familles impliquées dans ces projets sont parmi les instigateurs de ce qui allait donner naissance aux AIS. Dans le même temps, LST et TROC asbl développent depuis une trentaine d’années des pratiques d’habitats qui ont pour objectif de rejoindre et renforcer les résistances à la misère développées par des personnes et familles en situation de grande pauvreté.

Ces recherches et pratiques ont été initiées dès le début de nos luttes collectives lorsque dans les années 80, face à l’absence de réponse en matière d’habitat pour des personnes et familles qui se retrouvaient à la rue, des occupations de bâtiments vides que nous rénovions partiellement ont été organisées. Il s’agissait de mettre en évidence la problématique du logement des plus pauvres, la création d’habitat collectif, de mener une recherche sur la « maîtrise de l’habitat » par les plus pauvres qui regroupait durant deux ans des personnes en situation de grande pauvreté et des membres d’un centre de recherche des facultés de Namur.

Actuellement la mouvance liée à Luttes Solidarités Travail garde mémoire de plusieurs expériences en matière d’habitat et en poursuit le développement. Cela va des squatts organisés à la création d’une coopérative d’habitants.

Habiter en Solidarité

Ces recherches et mises en œuvre des projets liés à l’habitat ont donné « naissance » à un nouveau mot pour définir les occupants d’habitations qui se situent dans les projets de la mouvance LST-TROC. Ce sont les « ULTILISACTEURS » Ce terme « inventé » dans la mouvance LST-TROC situe les occupants de logements qui sont dans les différents projets. On le trouve dans les statuts de la SCRL Habiter en Solidarité (HES), société coopérative d’habitats » créée par les associations LST Namur et TROC asbl et des coopérateurs individuels.

Cette dénomination met en évidence trois choses, sachant que ces démarches sont développées en lien avec les réalités de vie des populations les plus pauvres:

  1. D’une part que la « valeur d’usage » trouve dans ces projets une place importante.
  2. Que les occupants des lieux d’habitation sont « acteurs » dans la gestion et la maîtrise de l’habitat.
  3. La structure propriétaire est dans certains cas une asbl, par exemple LST Namur et Andenne, ou TROC ce qui fait que le bien -l’habitat- est socialisé et occupé par des habitants « utilisacteurs ».

Dans le cas de la coopérative HES, l’habitat est collectivisé à travers les parts de coopérateurs. Les familles ou personnes qui occupent des habitations de la coopérative sont aussi des « utilisacteurs » et ils détiennent des parts. Ce projet est en œuvre depuis plus ou moins 3 ans et il est évalué en permanence.

La forme juridique coopérative permet au coopérateur de se prévaloir d’un titre de propriété pour une partie du patrimoine de la société. Ce qui n’est pas le cas dans les formes d’asbl.

Ces coopératives respectent les options du Conseil National des Coopératives (CNC) dont celle qui prévoit « un coopérateur = une voix ». Ainsi, un coopérateur qui n’a que peu de parts aura autant droit au chapitre qu’un coopérateur qui a un plus grand nombre de parts.

Une formule intermédiaire

Actuellement, certains membres du mouvement LST sont acteurs dans un projet pilote qui soutient une démarche d’accès à la propriété d’une famille nombreuse qui développe des résistances à la misère permanente.

La formule repose sur une emphytéose sur le bien via le Fonds du Logement Wallon (FLW). Un rachat de celui-ci dans le montant payé mensuellement est possible. Le financement des travaux de rénovation est assumé par un prêt social via le FLW.

Partenaires :

 La famille et ses enfants qui est ainsi assurée de pouvoir rester dans le logement qu’elle occupe depuis plusieurs années et qui était mis en vente.

 Le mouvement LST Andenne qui est en lien avec cette famille depuis de nombreuses années

 Le FLW qui assure ses fonctions en matière de promotion de l’habitat pour des familles nombreuses à faibles revenus.

 La scrl LST Coopérative, entreprise de construction et de rénovation du bâtiment qui assure le suivi et la coordination des travaux, assumés en collaboration ou par l’occupant. Cette société assure aussi les travaux particuliers qui nécessitent des compétences ou une mise en œuvre particulières. LST coopérative est une SCRL à finalité sociale créée à l’initiative du mouvement LST et active pour la formation dans le secteur de la construction depuis 1983.

Pour aller plus loin:

 Sur le mouvement LST

 Sur les coopératives agrées par le Conseil National de la Coopération