Carte blanche de la plateforme perspective 2030 – version NL

L‘Agenda 2030 des Nations Unies pour le développement durable a été adopté en septembre 2015, à New York. Au tiers du chemin, 2020 devait marquer le début d’une “décennie de l’action”, selon les mots du Secrétaire général des Nations Unies. Le Forum politique de haut niveau (High Level Political Forum ou HLPF, en anglais) était, à cet égard, perçu comme un moment clé sur la scène internationale, devant dresser le bilan de la mise en œuvre de l’Agenda 2030 et des progrès accomplis dans la réalisation des ODD [1]. Si le contexte sanitaire actuel ne permet pas la tenue physique d’événements internationaux, on peut se réjouir de l’organisation du HLPF en format virtuel, chose restée rare sur la scène des négociations internationales.

AJUSTER LA MISE EN ŒUVRE DES ODD EN TENANT COMPTE DE LA CRISE SANITAIRE

Dans un contexte global profondément perturbé par la pandémie, ce sommet politique doit se doubler d’un nouveau rôle : permettre de repenser les objectifs et leurs cibles au regard de nouveaux enjeux mis en exergue par la crise sanitaire.

png/odd5.pngPrenons l’exemple de l’ODD 5, portant sur l’égalité des genres [2]. Dans tous les métiers du soin aux personnes, 70% du personnel sont des femmes. A l’échelle mondiale, la grande majorité des femmes travaille dans le secteur informel. La pandémie et le confinement les ont donc particulièrement touchées, tant sur le plan social qu’économique, les plongeant dans la pauvreté plus rapidement qu’auparavant.

De tels reculs et menaces doivent être pris en compte dans la poursuite de la mise en œuvre de l’Agenda 2030, afin que des efforts supplémentaires soient fournis [3]. Cela vaut également au niveau belge. Les différents niveaux de pouvoir doivent eux aussi revoir leur plan de mise en œuvre de l’Agenda 2030, y incluant de nouveaux défis, lacunes et risques. Ils pourront s’appuyer pour ce faire sur les rapports et documents de vision éclairants des administrations publiques [4].

NE LAISSER PERSONNE SUR LE CÔTÉ

On l’a compris, la tenue de cette grand-messe internationale pour le développement durable tombe à un moment charnière. Si le format virtuel était très certainement la seule option possible en temps de pandémie, il apporte son lot d’obstacles à surmonter. Outre les questions pratiques de décalage horaire, la clé du succès d’un tel événement est qu’il soit inclusif et réellement transparent. D’une part, il faut une inclusion et une représentativité de tous les pays : veiller à ce que la fracture numérique et les coupures régulières de courant dans certains pays ne soient pas un frein majeur à la participation active des délégations concernées. D’autre part, il faut assurer que la société civile soit entendue et visible, notamment en assurant que les voix de la société civile des différents pays du monde soient inclues en priorité dans les différentes parties du HLPF, avec une représentation adéquate des organisations régionales et internationales de la société civile [5].

UNE GRILLE DE DURABILITÉ POUR MIEUX (RE)CONSTRUIRE

La pandémie a montré la fragilité de nos systèmes alimentaires et industriels, les lacunes de la protection sociale, l’impact négatif des formes de travail précaire et informel sur l’accès à la sécurité sociale, l’importance d’un financement durable et équitable de ce travail et l’importance d’une régulation assurée par les autorités politiques. La reconstruction économique doit être pensée à l’intérieur du cadre des 17 objectifs de développement durable [6]. S’il est n’est pas parfait, l’Agenda 2030 a le mérite de donner un cap et un cadre clairs, des mesures ambitieuses et une cohérence des politiques qui fait défaut dans le contexte actuel. Ces objectifs doivent constituer la « grille d’évaluation de la durabilité » pour les gouvernements, comme pour leurs experts et pour les entreprises, entre autre via la mise en place d’un dialogue social. Il s’agit donc de les intégrer dans les processus décisionnels, de manière à ce que les décisions adoptées dans le cadre de la relance économique soient compatibles avec l’Agenda 2030 et ses objectifs. En effet, ces derniers donnent un cadre de gouvernance mondiale qui soutient non seulement les droits internationaux des acteurs financiers et économiques, mais aussi les réglementations humaines, sociales, environnementales et sanitaires internationales.

LA SOLIDARITÉ COMME NOUVEAU SOCLE COMMUN

Les autorités belges pourront compter sur la participation active des ONG et des syndicats qui plaident depuis longtemps pour des solutions structurelles et la transformation des pratiques existantes, tant en matière de production que de consommation, de réduction des inégalités et de lutte contre la pauvreté [7], ou de nécessaire revalorisation des services publics [8].

Personne ne peut réaliser seul les ODD. L’expérience collective du confinement pour lutter contre le virus et assurer la santé de toutes et tous, nous a prouvé que la solidarité est la seule option valable. Elle doit être le nouveau socle pour l’Agenda 2030 et pour la décennie à venir.

Cette carte blanche est également disponible en néerlandais sur le site de 11.11.11

[1] Rappelons aussi les travaux coordonnés par l’ONU au niveau mondial, pour enregistrer les progrès des différents pays membres en matière de développement durable : Rapport Mondial sur le Développement Durable 2019 https://unstats.un.org/sdgs/report/2019/The-Sustainable-Development-Goals-Report-2019_French.pdf

[2] Son intitulé complet est : « Parvenir à l’égalité des sexes en autonomisant les femmes et les filles ».

[3] Voir à ce sujet : (Mai 2020) CONCORD, « Responding to COVID-19 : Forging a path to an equitable future » https://concordeurope.org/blog/2020/05/08/forging-a-path-to-an-equitable-future/

[4] Voir notamment : Bureau Fédéral du Plan : analyses dans le cadre de la crise du Covid 19 : https://www.plan.be/aboutus/overview.php?lang=fr&TM=41 – Rapports Fédéraux Développement Durable : https://www.plan.be/aboutus/overview.php?lang=fr&TM=71 – SPF Santé Publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement : document de vision « Covid 19 et transition durable » https://www.health.belgium.be/fr/news/covid-19-et-transition-durable

[5] Voir à ce sujet : (Avril 2020) Joint letter to UN Member States : Ensure meaningful virtual participation in 2020 review of the SDGs : https://www.civicus.org/index.php/media-resources/news/united-nations/new-york/4430-joint-letter-to-un-member-states-ensure-meaningful-virtual-participation-in-2020-review-of-the-sdgs

[6] Voir à ce sujet la carte blanche de plus de 250 scientifiques qui appellent à repenser d’urgence notre mode de développement www.lalibre.be/debats/opinions/plus-de-250-scientifiques-appellent-a-repenser-d-urgence-notre-mode-de-developpement-5e8dddb99978e2284155a4f0

[7] Rapport Durabilité et pauvreté du Service de Lutte contre la Pauvreté, coécrit avec des organisations dans lesquelles les pauvres se mobilisent https://www.luttepauvrete.be/wp-content/uploads/sites/2/2019/12/Durabilite-et-Pauvrete-Rapport-bisannuel.pdf

[8] Cf. notamment les conclusions du rapport « Mind the gap – les objectifs de développement durable une perspective belge », publication de la plateforme Perspective 2030, février 2019 : https://www.cncd.be/IMG/pdf/11-sdgrapport-fr-0219-lr.pdf

 

 

 

 

 

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