SDG Forum 2020

Atelier COVID-19 et la politique de relance vers une économie durable

La crise de la covid-19 a un impact très lourd sur notre société, ainsi que sur notre économie. Un plan de relance à court, moyen et long termes va devoir être élaboré. Comment les mesures socio-économiques de la politique de relance peuvent-elles à la fois remettre sur pied l’économie du pays et contribuer aux Objectifs de Développement durable ? Comment la politique de relance peut-être constituer une transition pour une économie et une société durables ?

Pour tenter de répondre à ces questions, l’IFDD a fait réaliser l’étude Donner une place à la durabilité dans la relance sociale et économique de la crise covid-19 (ULB – Ecores – PWC). Les résultats en ont été présentés le 28 octobre au SDG forum par Marek Hudon (ULB) et Emmanuel Mossay (Ecores), et commenté par des acteurs de la société civile. Thomas Dermine, Secrétaire d’Etat pour la Relance et les Investissements stratégiques, a conclu cette session.

Ce qu’on retient des recommandations et de l’échange

  • Gouvernance : nécessité d’un organe transversal qui analyse les impacts systémiques. Ex en France, Commissariat général au plan. Et qui prépare différents scénarios d’adaptation.
  • Experts : nécessité d’un panel universitaire probabiliste.
  • Vulnérabilité et inégalités : nécessité d’augmenter le remboursement des soins mentaux dus aux troubles post-traumatiques pour toutes les personnes sur le terrain et sous tension pendant la crise. Aussi réunir des acteurs spécialisés pour anticiper les besoins des plus vulnérables pendant les confinements, et prévoir des moyens pour les CPAS.
  • Mesures compensatoires: l’accès doit faire l’objet de priorités. Il faut renforcer les politiques pour réduire les inégalités préexistantes et renforcées par la crise. Ex. les SDF : la capacité de leur hébergement a diminué entre la 1ère et la 2ème
  • Comme l’a souvent pointé le Rapport Général sur la Pauvreté, l’accès aux droits n’est pas effectif. L’accès aux aides doit être fluidifié, en réutilisant les codes programmés des différentes plateformes existantes.
  • Les métiers essentiels nécessitent des formations spécifiques.
  • Coordination avec les collectifs et entrepreneurs : la collaboration n’a pas été travaillée. La coordination pendant la crise devrait permettre de soutenir les commerces les plus touchés.
  • Il y a lieu d’accélérer les procédures de régularisation pour les migrants qui ont les compétences nécessaires, tout comme l’équivalence des diplômes pour des personnes qui pourraient remplir des fonctions essentielles.
  • Gestion de la crise psychologique : il y a eu des tensions dans les hôpitaux psychiatriques. Il faut identifier les freins à une aide psychologique massive : par exemple compléter l’encadrement admin car aujourd’hui, une partie du personnel de la santé passent du temps à des tâches administratives. Ceci d’autant plus que cette crise psychologique va prendre encore plus d’ampleur durant ce deuxième confinement !
  • L’étude pointe aussi qu’on ne s’est pas servi de la procédure AIR pour la Crise Covid : une occasion manquée… (plus d’infos sur l’Analyse d’impact sur les réglementations).
  • N’oublions pas que dans, 11 mois, le gouvernement doit présenter son Plan Fédéral Développement Durable !

Territoires zéro chômeurs de longue durée : on en parlait justement le 21 septembre !

L’approche des territoires zéro chômeurs de longue durée est préconisée dans cette étude Relance post-Covid, pour « avoir suffisamment de personnes en réserve » : de l’avis des associations dans lesquelles les pauvres se rassemblent, cette manière de voir les territoires zéro chômeurs de longue durée, est vouée à l’échec car trop utilitariste.

C’est pourquoi nous saisissons l’occasion de ce compte-rendu pour présenter ce qui s’est dit à ce sujet lors du Forum Durabilité et Pauvreté le 21 septembre 2030 : le CESEP a réalisé une étude sur l’applicabilité de cette expérience française en Belgique. Paul Hermant l’a présentée dans l’atelier Travail-économie du forum Durabilité et Pauvreté du 21 septembre 2020. Déjà la situation en France n’est pas satisfaisante sur le terrain. Il s’agit de travailler sur des petits territoires, de supprimer le chômage de longue durée, de créer des entreprises afin de créer des emplois CDI à temps choisi. Le financement se base sur la récupération des montants du chômage et des compléments. Apparemment ce n’est pas suffisant, cela fait partie des choses à revoir. Surtout, si les besoins des territoires sont mis en priorité uniquement, on écrase les personnes. Si on met la priorité uniquement sur les personnes, on se cantonne aux soins, au care, aux besoins des vieilles personnes. Dès lors que cette proposition en débat au niveau politique, émerge le danger d’une approche verticalisée.

Or, au départ d’une initiative d’ATD-Quart-Monde, à présent des syndicats, des politiques, des intercommunales veulent s’en emparer. Gare à l’effet d’aubaine pour continuer à faire des sous-statuts. Ce projet n’a de sens que si les travailleurs ont du pouvoir dans l’entreprise, sont partie prenante des décisions et non assujettis. On casse alors le rapport de soumission. Et on va chercher tout le monde. Ainsi, pour dépasser aussi le cadre français, ici en Belgique le CESEP propose d’inclure les sans papier, les personnes privées de proposition d’emploi.

Luc Lefèbvre de Luttes Solidarités Travail trouve qu’il est difficile de promouvoir ce projet de territoire zéro chômeur tant que notre économie repose sur la concurrence. Dans cette logique, on laissera encore des gens, les plus pauvres, sur le côté. On voit déjà que le travail au noir est organisé et légalisé dans une certaine mesure.

De l’avis de Christine Mahy du Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté, si ça émerge en Belgique, il faudra défendre les poches de dynamiques qui existent déjà. Prenons l’exemple des producteurs locaux, ils font déjà un système de territoire zéro chômeurs de longue durée, qui ne se dit pas. Si ce n’est pas du chômage, c’est de l’indépendance dans la pauvreté. Dans l’associatif aussi, des acteurs essaient de créer ce genre d’initiatives. Il faut soutenir les initiatives qui respectent les travailleurs. Ce qui donnera de la force à de nouvelle initiatives c’est d’identifier ce qui se fait déjà et qui réussit. Afin de ne pas créer des bulles… Mais plutôt des archipels au départ les oasis, concluait Paul Hermant !

Thomas Dermine, secrétaire d’Etat à la relance

Retour au 28 octobre. La crise sanitaire va entraîner des faillites et des licenciements. Cette crise s’ajoute à différents défis : transition et nécessité de décarboner notre économie, digitalisation, inégalités qui se creusent… Tous ces défis sont encore plus saillants avec la Covid. Le Plan de relance est une opportunité pour relever ces défis.

Ce rapport montre l’importance des partenariats entre les différents acteurs. Certaines pistes qu’il contient sont dans l’accord de gouvernement. L’urgence à présent est d’éviter la catastrophe.

Le 2ème temps, on ne sait pas quand il commencera. Il faut concentrer les moyens au moment où l’économie le demande.

Le plan d’investissement stratégique était un plan d’excellente qualité. On y trouve des projets fondamentaux. Mais le gouvernement précédent a chuté au moment de le mettre en œuvre. Aussi les moyens financiers se trouvaient contraints par le Pacte de stabilité européen.

Aujourd’hui, 2 ans après ce plan, le monde a changé. La Commission nous incite à investir et finance. Il y a un an, il fallait se battre pour préserver le financement des soins de santé. A présent, on est conscients que la qualité de notre vie dépend d’autres choses que de la richesse matérielle.

Notre société est aussi vulnérable aux changements climatiques : ainsi, si la sécheresse et les fortes chaleurs s’étaient prolongées, cela aurait causé des problèmes pour l’agriculture, le rail, etc.

Dans l’accord de gouvernement, on retrouve une politique de grands investissements vers l’énergie propre, le numérique, la mobilité : ceci afin d’accélérer la transition vers 1 économie durable et résiliente.

Fiscalité : « le principal défaut des primevères et des paysages, c’est qu’ils sont gratuits » (Uxley)

  • Défi d’intégrer l’environnement dans la fiscalité.
  • Perception correcte de l’impôt : des moyens légaux toujours permettent d’éluder l’impôt (« loop-halls »). Des mesures seront prises pour plus de justice fiscale
  • Actuellement, l’impôt est élevé avec plein d’exceptions, il vaut mieux un taux facial plus bas avec moins d’exceptions. Il repose aussi trop sur les épaules des travailleurs. Le Ministre des finances Van Peteghem travaille à une réforme fiscale pour corriger ces défauts.

Et de conclure sur une citation de Kennedy : « si notre société n’est pas capable d’aider la majorité des plus pauvres, elle ne pourra rien faire pour sauver la minorité des plus riches ». Ce n’est plus une question de justice sociale mais avant tout de stabilité démocratique. Nos sociétés ne peuvent tolérer qu’un certain seuil d’inégalités. Le système démocratique est sous tension à cause de ces inégalités, qu’il faut réduire par divers moyens : relèvement des basses pensions, territoires zéro chômeurs… (Encore une fois cité ! Cf supra).