Le 23 septembre dernier avait lieu un échange croisé sur les Analyses d’Impact de la Réglementation en compagnie de Cédric van de Walle (Institut Fédéral pour le Développement Durable), Marie Bourgeois (Cellule autonome d’avis en développement durable du Service Public de Wallonie), Luc Lefèbvre (Luttes Solidarités Travail) et Paul-Marie Boulanger (Institut pour un Développement Durable). Voici un compte rendu de cet échange.

1/ Définition

Une analyse d’impact de la réglementation (A.I.R.) est une évaluation préalable des conséquences potentielles des projets de réglementations dans la sphère économique, sociale et environnementale et ce de manière transversale.

2/ La procédure au niveau fédéral

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L’A.I.R. repose donc au niveau fédéral sur quatre grands principes :

  • Anticipation : l’AIR doit être réalisée dès le début du processus de préparation du projet de réglementation afin d’être utile aux auteurs et responsables des réglementations (efficacité)
  • Intégration : pour ne pas alourdir la procédure, les deux tests existants et trois nouveaux tests ont été fusionnés : test Kafka, EIDD, test genre, test cohérence des politiques en faveur du développement et test PME.
  • Qualité : A la demande du ministre responsable, l’AIR pourra être examinée par le Comité d’Analyse des Impacts, lequel remet des suggestions d’amélioration quant à la complétude, l’exactitude et la pertinence des réponses fournies.
  • Transparence : les analyses d’impact sont publiées au moment où les projets de réglementations ou de décisions seront rendues publiques.

3/ La procédure au niveau wallon

La procédure existe également au niveau wallon même si l’on ne parle pas spécifiquement d’A.I.R.. En effet, l’article 9 du Décret relatif à la stratégie wallonne de développement durable (27 juin 2013) établit que « Le Gouvernement arrête les types de projets de décisions gouvernementales qui font l’objet d’un avis fondé sur un examen préalable et indépendant de conformité avec le développement durable et les principes directeurs […] ainsi que les modalités de l’examen sur lequel se fonde l’avis ». Cet examen de conformité avec le développement durable peut être assimilé à une A.I.R.

Il repose quant à lui sur 5 grands principes :

  • Principe d’intégration horizontale: du sectoriel au transversal : y-a-t-il eu prise en compte simultanée des impacts environnementaux, économiques et sociaux ?
  • Principe d’intégration verticale: du local au global : le projet de décision est-il cohérent à tous les échelons ? Y-a-t-il des répercussions en termes de solidarité internationale?
  • Principe d’équité intra-générationnelle: vers un bien-être optimal pour tous : le projet de décision améliore-t-il l’accès à une vie digne pour les générations actuelles
  • Principe d’équité inter-générationnelle: du court terme au long terme : fait-il courir des risques de conséquences graves et/ou irréversibles ? Est-il fondé sur une évaluation et/ou de la prospective ?
  • Principe de participation: de l’information à la mobilisation : la mobilisation de tous les acteurs concernés est-elle adéquate en amont et en aval du projet de décision ?

Quelques différences existent avec la procédure fédérale :

  • L’examen de conformité n’est pas rendu public, contrairement à l’A.I.R. fédérale
  • L’examen de conformité est mené par la Cellule autonome d’avis en Développement durable (au sein du SPW). Il s’agit donc d’une Cellule qui apporte un regard extérieur, tandis qu’au fédéral c’est le porteur du projet de décision qui mène l’analyse lui-même.

4/ Regards croisés

Lors de notre débat, différents questionnements ont émergé de l’échange entre les participants.
Premièrement, à partir du moment où le processus est facultatif, que reste-t-il de contraignant ? Au niveau fédéral, l’A.I.R. est obligatoire, mais il existe des dérogations. De plus, la soumission au Comité d’Analyse des Impacts n’est pas obligatoire. Quant bien même cette procédure serait suivie, il est de la responsabilité du porteur de projet de suivre les recommandations faites ou non. Au niveau wallon, l’examen de conformité est pour le moment obligatoire, le Ministre devant d’ailleurs répondre aux recommandations formulées par la Cellule autonome d’avis.

Deuxièmement, quel est le rôle de la société civile dans cette procédure ? De quel espace d’interpellation celle-ci dispose-t-elle dans la réflexion sur les impacts des réglementations ? N’ayant que 5 jours ouvrables pour remettre un avis, il est également fort peu probable que le Comité d’Analyse des Impacts ait le temps de consulter les acteurs pertinents sur le sujet. Quel est donc le réel ancrage de terrain de ces analyses d’impact ? L’ensemble des impacts d’une réglementation peuvent-ils être réellement pris en compte si les acteurs de la thématique ne sont pas consultés ?

A ces questionnements, grâce à nos différents angles d’approche, notre échange croisé a pu apporter quelques pistes de réponses :

  • Approche historique et méthodologique : d’où viennent les AIR ? Que retenir de l’évolution de ce processus ?
  • Approche sociale : comment faire en sorte que les AIR ne deviennent pas un nouvel outil de légitimation de politiques anti-sociales ?
  • Expérience des ONG actives dans la coopération au développement avec le cadre régissant la cohérence des politiques en faveur du développement, et autres exemples concrets dans divers secteurs.

Update: ces points de vue ont fait l’objet d’un Position Paper d’Associations 21, publié en novembre 2014.

Pour aller plus loin: