Associations 21 a préparé et animé cet atelier, documentant le suivi des inondations depuis l’été 2021. Les notes prises lors du Printemps Résilient le 17 juin, seront progressivement regroupées sur cette page portail. Voici des résumés des quatre interventions lors de l’atelier Inondations, suivies de quelques éléments de contexte.
L’expérience du citoyen “inondable”
Le collectif SOS Inondations Tubize a été créé en 1966. Patrick Installé y est actif depuis 10 ans. Ce collectif citoyen participe au Contrat de Rivière Senne, au Groupe Transversal Inondations (GTI, régional) et au Plan de Gestion des Risques d’Inondation (PGRI). La plus forte inondation à Tubize a eu lieu en novembre 2010. Cette expérience et les inondations de 2021 ont appris aux populations concernées qu’il y a différents temps d’observation et d’intervention : de 10 jours (météo européenne) à 15 minutes quand il ne reste plus qu’à se mettre à l’abri. Le niveau de l’eau implique aussi différentes attitudes : observations, vigilance, préparation, résistance, fuite… Patrick Installé pointe le difficile passage à témoin et l’importance de la mémoire citoyenne : les ouvrages d’art rendent les débordements plus rares, mais du coup, les riverains sont moins préparés à leurs conséquences, d’où l’importance que les gestionnaires des équipements informent la population en aval.
La solidarité citoyenne est un facteur essentiel de résilience. Cependant, à plus de 100 mètres de l’inondation, les habitants ne se rendent compte de rien, si ce n’est par les médias. Autre facteur, la coordination : chaque organisation semble très résiliente mais l’ensemble ne l’est pas. Il y a aussi les problèmes de sécurité (pillages), la manipulation des valeurs… Bref, dans la durée, le rôle de veille et d’interpellation de collectifs comme SOS Inondations Tubize est fondamental.
L’expérience d’une citoyenne bénévole
Anne Durieux, bénévole très active suite aux inondations de juillet 2021, est aussi devenue une « lanceuse d’alerte ». A présent, elle fonde avec d’autres l’asbl Belg’Aide. Comme d’autres, elle a éprouvé que la région la plus touchée, la vallée de la Vesdre, était déjà une zone fragile. Les bénévoles ont très vite compris qu’une gestion de crise en situation extrême n’avait pas été prévue et que le chemin de la reconstruction serait très long. Régulièrement sur place, elle a pu construire une relation de confiance avec des habitants. Les appels à l’aide concernaient surtout le mal être et le relogement. C’est ainsi qu’avec François Dvorak, elle a créé le collectif « Les Petits Robins des toits » qui ont interpelé les gestionnaires de logements sociaux vides et les politiques concernés. Comme rien ne bougeait, il a fallu en venir à la désobéissance civile. Le dialogue s’est construit avec certaines autorités, l’aide des sinistrés s’est formalisée via un formulaire… Enfin les DASI (dispositifs d’accompagnement social suite aux inondations) ont pris le relais (il a fallu les briefer !)
Anne Durieux en retient qu’il faudrait renforcer la culture du risque, organiser des entraînements, et surtout prévoir de l’écoute, de l’aide sur le terrain. La bureaucratie ajoute des obstacles supplémentaires, surtout quand tous les documents ont été emportés par les eaux ! Il faut tenir compte de la fracture numérique et viser la simplification administrative. Le citoyen bénévole doit faire partie de la solution, ce qui ne figure pas dans les 161 recommandations du Parlement Wallon. Pourquoi pas un service citoyen pour nous préparer aux situations d’urgence, comme en France ? Quant à la rénovation des logements publics, tributaire des marchés publics, en situation d’urgence, elle devrait pouvoir faire l’objet de dérogations (aides de stagiaires, etc).
L’expérience d’un ingénieur de la Province du Hainaut
Benjamin Lenglez travaille au service d’Ingéniérie Technique provincial Naqia, du nom d’une reine babylonienne connue pour ses travaux hydrauliques. Ce service étudie les comportements des cours d’eau, estime les débits et ouvrages à prévoir. Diverses techniques sont possibles, ex. les zones d’immersion temporaires (ZIT). L’ouvrage est modélisé et s’il est confirmé, réalisé. Une contrainte dans l’avancement des ouvrages : l’accès au foncier. Un enjeu important pour la résilience : la maintenance !
En 2021, ils n’a pas plu autant sur le Hainaut qu’en province de Liège mais en tout cas, ces ouvrages ont limité les dégâts. Le génie civil évolue vers une plus grande prise en compte de la biodiversité. Le nouveau décret cours d’eau a revu la loi de 1967 qui était pour le tout à la bétonnisation. Le rôle de rendre au cours d’eau son cours naturel est renforcé : hydromorphologie, reméandrage… L’entretien est plus « doux » qu’auparavant. On évite le béton, on en profite pour renforcer les vasières etc. Les projets sont beaucoup plus verts que par le passé.
Task Force Vesdre
Powerpoint
Karel Wuytack présente la Task Force Vesdre l’ULiège, équipe scientifique interdisciplinaire créée en septembre 2021 au sein de l’ULiège, et rejointe par des équipes de la KULeuven et de l’ULB. Cette équipe mène une recherche-projet fondée sur une démarche de « prospective territoriale » articulée en une série de scénarios, alimentant, ce faisant, les thèmes et ambitions du débat public. C’est donc un outil d’aide à la décision.
Des rencontres avec les citoyens et les autorités publiques ont nourri le travail académique pour le « Schéma stratégique multidisciplinaire du bassin versant de la Vesdre » (master plan), et d’autre part, les ateliers interdisciplinaires avec les étudiant·es qui nourrissent aussi ce master plan. Leurs réalisations font l’objet d’une exposition jusqu’au 15 juillet dans la gare de Verviers (ancienne salle des guichets).
La Task Force Vesdre a également organisé en avril un workshop international avec les universités de Rein et de Lausanne : Aléas climatiques et inondations : Penser Chaudfontaine dans une perspective d’adaptation(s).
le « déluge » dans la vallée de la Vesdre est appréhendé comme métaphore planétaire d’une époque de transition qui investit le projet de territoire d’un rôle inédit et prometteur : il s’agit de passer de « Nous, après le déluge » ou de « Après nous, le déluge », à « Nous auprès du déluge », sous-titre de l’expo à Verviers…
Notre écho de l’expo, visitée le 7 juillet.
Le cadre général
En préparation à cet atelier, nous avons recueilli les explications de Benjamin Englebert, de la Direction des Cours d’Eau non navigables (DCENN – SPW), qui était également présent le 17 juin. Benjamin Englebert est chargé, dans le cadre de la Directive Inondations, de l’évaluation préliminaire, sur base de laquelle s’établit les cartographies, puis les plans de gestions des risques d’inondations (PGRI). Suivant ces différentes étapes, différentes mesures sont prises :
- Prévention : empêcher les constructions en zones inondables
- Mise en place de comités techniques par sous-bassin,…
- Protection: ouvrage de stockage,…
- Préparation: systèmes d’alerte,…
- Réparation et analyse post-crise : débriefing,…
Dans le cadre du Plan de Relance de la Wallonie, il y a déjà eu, fin 2021 : subsides aux communes pour mettre en œuvre les PGRI. Et le 30 mai 2022, l’appel à projet Résilience Biodiversité – Climat a été lancé (Projet n°99 du Plan de Relance). Il concerne plus spécialement les ZIT (zones d’immersion temporaire) : renaturation, reméandration…
On peut se demander (comme le fait Olivier Baltus, écologue et habitant de Trooz), si ce n’est pas faire et défaire quand on voit comment les berges de la Vesdre ont été enrochées en maints endroits…
Une initiative qui a également éveillé notre intérêt : le Projet Culture du risque Inondations du Contrat de Rivière Escaut-Lys. Vu son succès, ce projet va être prolongé de 2 ans et étendu à d’autres contrats de rivière. On attend avec impatience de savoir lesquels !
A présent, la Wallonie lance un appel à projet Résilience à l’adresse des asbl souhaitant mettre en place des lieux de dialogue, de sensibilisation, de formation ou organiser des évènements dédiés à mieux préparer notre territoire aux risques environnementaux. DL 14/09/22 !